18 Avril 2013
Entrée en port de Bastia au petit matin.
Ce voyage en Corse était d'abord motivé par des visites de magasins pour présenter la marque de vêtements Montura mais aussi par la possibilité d'avoir quelques journées de grimpe.
Nous sommes partis avec une prévision météo peu favorable : nuages, pluies et vents.
En Corse même les arbres ont un caractère si fort qu'ils sont capables de briser le rocher!
Dès notre arrivé au petit matin dans le port de Bastia les prévisions se confirment : crachin breton, vent patagonien, ciel bas et noir des Flandres. Nous rejoignons Corté ; puis avec l’espoir d'une journée du lendemain plus favorable Bavella.
La Punta di u Corbu, la voie du Dos de l'Eléphant suit le grand pilier incliné.
Topo de la voie avec son tracé en bleu
Dès le matin le ciel est partagé entre nuages du coté occidental du col de Bavella et trouées de ciel bleu sur le versant occidental. Nous voyons bien les nuages passer à vitesse grand V au-dessus des crêtes mais une voie nous tente. Qualifié de plus belle escalade granitique de France par Catherine Destivelle, c'est La voie à faire !
Approche: traversée du torrent U Pulishellu.
L'Eléphant nous tourne le dos. Tirons lui la queue!
Nous voilà donc parti pour le « Dos de l'éléphant » ainsi ce nomme notre objectif.
L'approche emprunte un sentier bien marqué et nous voilà rapidement au pied du « dos ».
Christophe attaque la première longueur : un 6a+ en dalle sur bossette qui fut ouverte avec seulement 3 spits. Bravo messieurs les ouvreurs ! (P. D'Arbois, P. Faivre et P. Tanguy)
A nos yeux si le rééquipement des voies pour changer les mauvais spits en place est justifié sans discussion, le rajout de points nous semble pas souhaitable. Et là de nombreux points furent rajoutés (la L4 comportait un seul spit à l'ouverture). Dommage !
La L1 ...
... ouverte avec 3 spits.
La L2 et ...
... son petit toit...
qui offre un réta en dalle.
J’enchaîne sur les tafonis de la L2. L3 pour Christophe, la plus difficile. Normale il est BE escalade spécialiste en escalade rocheuse et moi juste guide... D’ailleurs le 6b+ ne lui résiste pas longtemps. Non plus sérieusement il grimpe régulièrement et moi depuis un an j'ai juste fais deux fois du rocher.
Attaque de la L3 en 6b+.
La L4 en fissure...
..ouverte avec...
... un seul spit.
La L4 est une jolie fissure sans histoire. Nous voilà sur ce fameux dos et ses longueurs en dalle en adhérence. Christophe part dans la longueur suivante, d'en seul coup une bourrasque de vent le chahute. Tout au plaisir de ce rocher merveilleux nous ne levions plus les yeux que pour chercher notre itinéraire, oubliant de regarder le ciel. De gros nuages débordent des crêtes sommitales maintenant toute proches et des rafales de vents viennent s'enroulaient derrière la crête sur ce fameux dos rocheux. Une longueur en 6a me tends les bras.
C'est une escalade pas vraiment difficile mais l’éloignement de chaque de points, me fait vivre par avant les affres d'une chute. Sentiment que connaît le gruyère lorsqu'il voit arriver la râpe à fromage ( pensez à lui lors de votre prochain plat de spaghetti....) Je suis comme un coureur au départ d'en 100m, bloquer dans mes starting block. J’attends l'accalmie pour jaillir du relais. Le vent tombe, je parts, d'abord à un rythme classique puis mis en confiance par l’adhérence du rocher et me disant que les bonnes choses ont toujours une fin trop précoce, j’accélère. Christophe me donne de la corde à grandes brassées. C'est au rythme d'un sprinteur que j'arrive au relais sans connaître les joies de la râpe à fromage. Ouf !
La L5...
....
... avec Chritophe..
... les mains bien...
... à plat.
Christophe me rejoint sous un vent de plus en plus violent, je commence à avoir froid. Il attaque la longueur suivant, copie de la mienne. Lui aussi s’élance en saisissant l'opportunité d'une accalmie mais une brusque et violente bourrasque le plaque au rocher. Celle ci insiste, essayant de la décrocher. Je vois alors Christophe se coller au rocher pour offrir le moins de surfaces possibles au vent et pour chercher le maximum de contacts avec le rocher. Je pense alors à cette blague des fourmis qui se rebellent contre un éléphant qui a prit l'habitude de passer chaque jour sur leur nid. Les fourmis décident d'attaquer l’éléphant, elles partent à l'assaut du monstre gravissant par centaines ses pattes et montent sur sont dos. Excédait l’éléphant s’ébroue. Toutes les fourmis tombent sauf une. Alors au sol, les fourmis tombées crient à la seule qui est restait sur le dos du pachyderme : "étrangle-le ! Etrangle-le ! ».
Christophe est sur le dos d'un l'éléphant entrain de s’ébrouer ! Je ne peux pas lui crier « étrangle-le ! Etrangle-le ! »... Et oui dans cette tempête il ne m'entendrait pas !
Notre objectif du lendemain...
... la Punta di u Peru.
Profitant d'une autre période de relâche, il se jette en avant pour finir la longueur. Je le rejoins au relais claquant des dents sous un vent de plus en plus violent. Il nous reste deux longueurs, nous décidons d'abandonner le combat. Nous jetons le rappel et Christophe descend, c'est le calme de l’œil du cyclone. Lorsque je descends à mon tour le vent revient et sa prise sur la corde tendue par mon poids au-dessus de moi me soulève de plus d'un mètre avant de me laisser brusquement tomber. Fisa ! En bas à toutes vitesses !
Nous rejoignons nos sacs après les avoir abandonner 3 heures plus tôt. C'est le bon coté des choses. Le bas abrité du vent ne laisse rien imaginé de la violence des éléments naturels qui battent le haut de ce pilier. Plus tard nous apprendrons que la Corse connaissait un avis de tempête ce jour là avec des vents à 130km/h et que le topo conseille de réaliser cette voie par grand vent pour connaitre les titilements de l'engagement à ceux dont le niveau est trop élévé Nous confirmons!
Le topo de la voie U Haddad (tracé en blanc)
Des tafonis....
.... des tafonis et ....
.... des tafonis!
La suite est plus en fissure .
Dernière longueur: magnifique!
Rappel avant la pluie.
La seconde voie fut dictée par une prévision météo favorable se limitant à la demi-journée.
Le style est différent du dos avec de magnifiques tafonis et une longueur finale dans une fissure dièdre splendide. Ce fut un allé retour de 2H1/2 sans histoire.
Vieux port de Bastia...
... et son golf sous un ciel bien bas avec les sommets enneigés au loin.
Malgré leur resistance à l'envahisement, la Corse subit elle aussi la pollution maritime par les matières plastiques.
Un rayon de soleil: un peu de couenne vers Bastia.
Non, il fait toujours beau en Corse!
La suite ne fut que pluie, pluie et pluie…. Nous écourtons donc notre séjour.