5 Décembre 2010
Christine après quelques années d’interruption, voulait reprendre l’escalade par l’ascension d’un sommet qui marqua l’histoire de l’alpinisme : le Mont Aiguille. Les premières chutes de neige d’octobre nous avaient fait abandonner ce projet.
Le St Julien, face S, la traversée suit les arêtes de gauche à droite.
Pour cette fin novembre rendez vous est donc prit pour faire la traversée des arêtes du St Julien à Buis les Baronnies. Ce ici qu’une belle histoire alpine oubliée débuta en 1932. Une cordée composée, excusez du peu, par un guide de la célèbre compagnie de Chamonix Alfred Couttet et de son client américain tenta une première fois de réaliser cette traversée d’arête. Son client jeta l’éponge devant les difficultés de l’actuelle dalle à Bibus (ressaut du Châtelet W).
Le vent soulève veste, sangles et nous bouscule!
Couttet reviendra deux autres fois et devra à chaque fois renoncer à la traversée intégrale, bien qu’ayant rejoint le sommet (Il y laissera un message dans une bouteille) et par-là ayant effectué plus des 2/3 de cette traversée. Finalement c’est un Valentinois, Ferrière ( Ouf l’honneur est sauf !) qui réussira la première traversée intégrale des arêtes du St Julien le 31 mars 1946 en compagnie de Maurice Donjon. Couttet ne lâcha pas le morceau, il revient enfin terminer son projet le 24 août 1946 avec un membre de la section du CAF de Chamonix. Comme vous pouvez le voir dès l’avant guerre les falaises drômoises font partie de l’imaginaire non seulement de la plus fameuse compagnie de guide de l’époque ( avec celle de Zermatt) mais aussi d’alpinistes internationaux. Gravir la plupart des parois de notre département semblaient à l’époque complètement impossible (3Becs, Archiane, Glandasse). Il faudra attendre les années 60/70 pour que les grands noms de l’époque se sentent suffisamment armés pour les affronter. Aujourd’hui sur ces même arêtes avec Christine, nous affrontons un fort vent du nord, puissant et glaciale. Et comme nos antiques prédécesseurs, au pied de la dalle à Bibus nous fuyons par des rappels. Trop froid, trop désagréable….. La face nord du Ventoux telle un Fuji-Yama provençal nous regarde l’œil goguenard. Nous décidons de gravir une voie classique en face sud, protéger du Mistral.
Traversée en 5c dans la L2 de la Bouscaude Directe.
Ce sera la Bouscaude Directe… La dernière longueur et exceptionnelle tant par la qualité du rocher que par sa difficulté homogène. Cotée en 4+ sur le topo de 1970 elle est cote 5+ sur celui de 1992. En vingt ans , ce n’est pas un phénomène d’érosion de prise qui en est la causse. Il faut dire que la cotation 6 était utilisée avec parcimonie, car défini comme étant la limite des possibilités humaines dans le système de cotation mise au point par l'alpiniste allemand Willo Welzenbach en 1925. Cette définition créa un tassement des cotations qui fut d’abord ouvert par les Bleausards par le rajout de lettre ( a, b, c, d, e, f..) au fameux chiffre 6, puis par l’ouverture officielle des cotations vers le haut vers la fin des années 70.
La magnifique dernière longueur de la Bouscaude Directe.
Ainsi vous comprendrez pourquoi certains sites ouverts dans les années 70/80 sont si sévèrement cotés.
Vue du col de la Bataille sur notre terrain de jeu: austère!
Le lendemain, je vais pratiquer une autre spécialité alpine locale : l’escalade sur herbe gelée. Ce jeu nous vient d’Ecosse où là aussi la tradition remonte au siècle passé. Non pas le dernier mais l’avant dernier. Dans les années 1880 de doux fous exploraient avec un matériel des plus rudimentaire les Ben ( sommets) des Highlands écossais. Rapidement ils s’aperçurent que l’herbe gelée valait la glace. Après un voyage avec le club valentinois Densité en Ecosse, Christophe Raillon trouva cette paroi du col de la Bataille couverte de pentes d’herbe.
De la neige dans l'approche.
C'est là... et c'est raide!
Nous commençâmes notre exploration par les itinéraires les plus évidents et les plus simples, nous protégeant uniquement avec des coinceurs pitons et ancre à glace. Suite à une chute mémorable de près de 30 m de l’un des notre, heureusement sans gravité, nous avons commencé à rajouter quelques goujons dans les itinéraires « classiques » ouverts. Oh, pas beaucoup, juste histoire de limité la hauteur de chute au fameux record de 30 mètres.
De gauche à droite: Sitting Bull, Gare au Loup et Chasse Gardée.
Géronimo, une des plus difficile!
La même de profil: Raide!
La plus classique: la Grande Motte, que nous gravirons auourd'hui..........
Puis nous nous sommes enhardis et nous sommes lancés dans des itinéraires beaucoup plus raides ou le rocher plus compact et les mottes d’herbes moins nombreuses nous obligèrent à nous protéger sur goujons. Cette escalade est unique, chaque ancrage, chaque mouvement est délicat, c’est un des meilleurs terrains école d’escalade mixte alpine que je connaisse avec l’Ecosse.
........Seb le Décimé met ses crampons........
......Rémy attaque la L1 de la Grande Motte.....
......Rémy dans la L2.........
..... et oui j'ai oublié mes crampons et mon baudrier......
.......Seb dans la L2.......
......Seb attaque la L3 en tête...............Rémy sort avec une belle onglée de la L3........
.... sous l'oeil rieur d'un chamois.......
....la magnifique dernière longueur (L4) de la Grande Motte. Une voie dont je ne me lasse pas!Filets posés sur l'extrémité Nord de la falaise suite à un éffondrement. Pourvu que ça s'arrête là!