10 Mai 2023
J’ai eu le plaisir de rencontrer Jean-Pierre Frésafond qui vient de disparaître, lors d’une session de la Mountain Academy créé par mes amis Jérôme Blanc-Gras et Fred Meynant.
Cette formation, à l’alpinisme offerte à de jeunes européens, faisait étape pour une semaine dans la Drôme avec comme thème l’ascension des grandes voies classiques et sauvages des parois sud du Vercors.
Alors que je cherchais quelle figure de cette époque-là, je pouvais inviter pour partager cette histoire, ses expériences et cette passion ; Alain Nivon, pilier du CAF de Valence témoin de cette ère, me soufflât à l’oreille le nom de Jean-Pierre Frésafond en me disant qu’il était au cœur des « touts forts « de l’époque et qu’encorder avec Dominique Leprince-Ringuet , il formait une des cordées des plus redoutable. Il achevant son discours par un mystérieux : « Frésafond ? C’est pas un grimpeur ! C’est un treuil ! »
Je connaissais le nom de Jean Pierre Frésafond au travers l’ouverture de voies remarquables dans le Diois. Toujours en compagnie de Dominique Leprince-Ringuet ; dont voici la liste :
- À Archiane : Voie Sans Issue, voie du Dièdre Gris, voie de la Paroi Rouge.
- Au Glandasse : voie du Pilier Leprince-Ringuet et voie de l’Arche Romane.
Excusez du peu !
Et même un petit passage à Saou pour l’arête sud de l’aiguille de la Tour avec André Parat. Je le savais aussi acteur en Himalaya sur le premier 8000 des Lyonnais : Gasherbrum II.
Jean-Pierre Frésafond vint donc à l’abbaye de Valcroissant, notre camp de base pour cette cession de la Mountain Academy. Je vis arriver un homme trapu, dégageant une impression de force imperturbable et immédiatement, je compris le : « Frésafond ? C’est pas un grimpeur ! C’est un treuil ! » d’Alain.
Répondant gentiment et patiemment aux questions de nos jeunes alpinistes, il minimisait son action et revendiquait son rôle d’accompagnant, de second, de logisticien. Là aussi, l’image du treuil traversa mon esprit.
Il parla longuement et avec admiration de Dominique Leprince-Ringuet, de son haut niveau de grimpeur, de ses visions novatrices sur le matériel, de son audace à imaginer des voies dans les faces les plus raides comme pour la Paroi Rouge, que lui nommait « la chiasse rouge » tant ce lancer dans cette aventure lui tordait le ventre.
J’ai ainsi pu assister à un petit moment d’échange délicieux entre Jean Pierre Frésafond et Liv Sansoz qui participer à la Mountain Academy comme athlète représentant une marque de matériel.
Liv venait de gravir la voie de la Paroi Rouge. Voie mythique d’une verticalité ébouriffante, ouverte par un trio de cadors : B.Conod, J-P Fresafond et D Leprince-Ringuet au printemps 1965.
Liv : « Je viens de faire votre voie. Bravo, impressionnant ! »
J-P : « Oui, c’était une belle aventure ».
Liv : « Vous avez passé plusieurs jours ? »
J-P : « Oui ».
Liv : « Vous bivouaquez sur portaledg… » Arrêtant sa phrase en comprenant aux yeux ronds de J-P qu’il ne connaît pas le mot et reprenant «… Des hamacs ? »
J-P : « Non, non »
Liv surprise : « Ah ? »
J-P : « Une jambe dans chaque étrier… »
Liv : « Dans le baudrier ! »
J-P : « Non, nous n’avions pas de baudrier ».
Liv pensive : « Pas de baudrier ! « Marquant un temps : « et… Pour manger… Des soupes ? »
J-P : « Non, non ! Nous n’avions pas de réchaud. »
Liv : « Ah ! »
J-P : « Du pain, du saucisson et du fromage »
Liv : « Trois jours ? »
J-P : « Oui »
Merci Jean-Pierre, pour ses si belles voies du Diois, qui génération après génération font toujours rêver les grimpeurs. Merci pour ton rôle d’organisateur des expéditions lyonnaises, merci pour ton implication comme président du GHM.
Merci pour ton exemple qui prouve qu’on peut faire de belles choses modestement.